Un nom disparu
S’y rejoignent alors trois rues : la rue de la Sellerie qui mène à la place, la rue de la sous-préfecture, orientée vers l’est (ces deux rues se trouvent approximativement à l’emplacement des fossés des premières fortifications de la ville, érigées après le sac normand de 883), et enfin la rue Anatole-France, qui permet de contourner la place de l’Hôtel-de-Ville en direction de l’ouest.
Ce carrefour doit sans doute son nom à ses multiples directions, lieu de rencontre de tous les habitants, de tous les voyageurs et de tous les vents. Jusqu’en 1920, son nom s’inscrit sur la façade de l’épicerie-buvette à l’angle de la rue de la Caisse-d’Épargne, actuelle rue Anatole-France. Il est oublié depuis….
Des immeubles hétérogènes
Pratiquement rasé par les bombardements en 1917-1918, le carrefour des Quatre-Vents est reconstruit dans les années 1920-1930. À chaque angle se dresse un immeuble à vocation commerciale, chacun de formes et de styles différents, et pourtant construit en une décennie.
À l’angle de la rue de la sous-préfecture, un bâtiment à structure métallique, habillé de verre et de grès-cérame est achevé en 1923. Il s’agit d’une reconstruction à l’identique des grands magasins Séret édifiés en 1910 par l’architecte Joseph Chérier, après l’incendie qui détruisit le premier magasin construit en 1898. L’angle est marqué par une rotonde coiffée d’un dôme en cuivre, élément hérité de l’architecture commerciale de la deuxième moitié du 19e siècle.
De l’autre côté, à l’angle de la rue de la Sellerie, se dresse un immeuble mixte, de commerce (bijouterie « Au Chardon ») et d’habitation, de style néo-classique, œuvre de l’architecte Gustave Malgras-Delmas. Dessiné en 1922, il prend comme modèle le pavillon de Hanovre construit à Paris sous Louis XV, référence maintes fois reprise, notamment par les architectes Paul Bigot et Louis Guindez pour le musée de la ville, le musée Antoine Lécuyer.
À l’autre angle, la même année, l’architecte Louis Brassart-Mariage conçoit un immeuble moderne, entièrement en béton armé, pour le magasin Devred. Une rotonde coiffée d’un dôme rappelle qu’il s’agit d’un immeuble commercial, celui de la troisième succursale des magasins Devred, installée à Saint-Quentin en 1907.
À l’angle de la rue d’Isle, l’ancienne épicerie-buvette des Quatre-Vents a survécu à la guerre, mais, frappée d’alignement, elle est remplacée par un immeuble de style Art déco, probablement de l’architecte Malgras-Delmas, dont la façade est rythmée à l’étage par des bow-windows surmontés de grandes lucarnes.
Du côté opposé du carrefour, les magasins Séret font appel à l’architecte Jules Arduin pour construire une vaste extension, immeuble Art déco daté de 1933, en bordure d’une rue nouvellement percée, la rue de Lyon.
La percée de la rue de Lyonvpuis la rue Croix-Belle-Porte pour ensuite pénétrer dans la rue Saint-Jean, actuelle rue Raspail. Le centre de la ville étant l’une des zones les plus touchées par les destructions de la Grande Guerre, l’architecte Paul Bigot, en charge du plan d’extension et d’embellissement, conçoit une grande percée à travers les vieilles rues héritées du Moyen Âge pour relier directement la rue d’Isle et la rue Raspail. Cette percée donne naissance à deux nouvelles voies, la rue de Lyon, en hommage à la cité marraine de Saint-Quentin pour sa reconstruction, et la rue Adrien Nordet, premier maire socialiste de la ville avant-guerre.