Un tournant artistique
Le portail de la cathédrale de Senlis est le fruit des innovations artistiques développées à Saint-Denis puis à Chartres, à partir des années 1130. Le traitement du couronnement de la Vierge marque une étape importante dans l’histoire de l’art car il témoigne à Senlis, au 12e siècle, d’une sensibilité religieuse nouvelle avec l’apparition de la figure mariale, douce, qui intercède auprès de son fils pour la cause des êtres humains.
L’ensemble révèle le rôle important tenu par le décor sur les édifices religieux, véritable média avant l’heure pour une population dont la majorité ne sait pas lire. L’architecture se fait support du message religieux et miroir des mentalités de son époque.
Composition du portail
Le portail n’a subi que très peu de modifications depuis le 12e siècle. La Révolution a infligé des dégradations assez limitées aux sculptures. Il se compose de plusieurs éléments, les ébrasements qui sont garnis par des statues-colonnes, représentatives de l’une des innovations les plus importantes de la première sculpture gothique, les voussures qui dominent le portail composent un arbre de Jessé, le linteau est composé de deux parties qui se lisent de gauche à droite pour raconter la dormition de la Vierge, dont le couronnement est figuré sur le tympan.
Interprétation des sculptures
Les statues colonnes décapitées à la Révolution ont été restaurées au milieu du 19e siècle et couronnées de doubles chapiteaux. De part et d’autre du portail, de gauche à droite, les statues colonnes figurent Jean-Baptiste, Aaron, Moïse et Abraham et, de l’autre côté, toujours de gauche à droite, Siméon, Jérémie, Isaïe et David. Dans les ébrasements, au pied des statues colonnes, se trouve un calendrier sculpté, le seul conservé sur un portail de cathédrale dans l’Oise. Il se lit du nord-ouest au sud-ouest, de part et d’autre des portes. Chaque mois de l’année est représenté par une activité spécifique à la période comme par exemple le mois de février symbolisé par un personnage qui se réchauffe au coin du feu. Dans la liturgie catholique, la dormition de la vierge est considérée comme le court moment qui précède sa montée au paradis, elle ne meurt pas de vieillesse ou de maladie mais bascule dans une forme de sommeil. Cette partie du récit est représentée à gauche du linteau, tandis que la partie droite figure les anges qui la réveillent pour l’emmener au paradis. Le tympan représente l’épisode liturgique du couronnement de la Vierge, moment où la mère du Christ est appelée à régner à ses côtés.