La question du logement dans les années d’après-guerre
Sinistrée à 85% à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, la ville de Boulogne-sur-Mer fait l’objet d’une reconstruction par Pierre Vivien qui y orchestre un véritable plan d’urbanisme et de modernisation. Erigés au rang de monuments, les « buildings » – selon l’appellation d’usage – symbolisent l’importance accordée à la question du logement dans les années d’après-guerre.
Dans ce nouveau paysage urbain respectant globalement les hauteurs et la voirie d’avant-guerre, les 4 buildings du Quai Gambetta représentent une rupture radicale. Leur origine se trouve sans doute dans la demande du Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme faite à Roger Berrier en octobre 1944. Le MRU envisage la reconstruction du centre-ville par des immeubles en hauteur. Cette requête est finalement abandonnée, à l’exception de ces quatre tours jumelles.
Une structure moderne
Symboles de la Reconstruction, les tours se dressent devant le port de marée et sont hautes de près 40 mètres. Disposées en oblique sur une parcelle étroite et allongée, elles sont orientées dans la perspective du chenal, en vitrine de la ville nouvelle. Fondé sur une ossature en béton armé de 48 poteaux, chaque immeuble compte 12 niveaux, dont 9 d’appartements, formant un total d’environ 200 logements. Les trois premiers niveaux superposent : un niveau de commerces, un étage de bureaux et d’hôtels et un étage destiné au personnel de service comprenant des réserves et des « chambres de bonnes ». A chaque niveau dédié aux appartements, les 3 plus grands sont traversant. Ils proposent une différenciation espace jour/nuit, exposant à l’ouest (côté port) le séjour et la cuisine, à l’est, les chambres. Ils réservent ainsi entre-deux les espaces sanitaires, de rangement et de circulation. Leurs hautes façades alternant les vides et les pleins, superposent deux séries de loggias symétriques, et s’animent d’un jeu de polychromie qui les différencie (bleu et rouge, ocre et bleu, vert et jaune, ocre et rouge).
Le chantier se déroule de janvier 1951 à la fin de l’année 1955 selon une progression du building « D » (le plus éloigné du centre-ville) vers le « A ». En 1954, est présenté un appartement-témoin réunissant des mobiliers signés des grands décorateurs de l’époque (André Monpoix, Pierre Guariche, Michel Mortier, André Motte et René-Jean Caillette). Les appartements sont vendus et habités dès la fin de l’année 1955.
Depuis le 15 décembre 2009, le label « Patrimoine du XXe siècle », aujourd’hui « Patrimoine contemporain remarquable » du Ministère de la Culture est attribué aux buildings boulonnais.