Une usine symbole
La société Motte-Bossut est d’abord installée dans une formidable bâtisse appelée alors la « filature monstre », à 100 mètres en face du site actuel. Lorsqu’un incendie détruit l’usine pour la troisième fois en 1866, la production reprend dans une annexe récemment construite de l’autre côté de l’ancien canal. Cette usine, qui compte 120 000 broches en 1865, est flanquée d’une tour d’escalier et d’une cheminée crénelée. En 1876, elle est doublée d’un édifice d’égale importance, auquel elle est reliée par une passerelle enjambant la rue des Filatures. La seconde tour polygonale, située sur l’accès principal, est construite en 1905. Les derniers aménagements datent de 1920. L’imposante silhouette du corps principal domine l’ensemble. Cette nef de cinq étages frappe par sa solidité et son homogénéité architecturale. Au nord, cinq travées coiffées de pignons à redents se succèdent le long du boulevard Leclerc et évoquent une série de maisons jointives. Le style de la porte principale s’inspire de l’architecture militaire médiévale, phénomène également en vogue en Angleterre. Le procédé de construction des volumes intérieurs, des colonnes de fonte supportant des poutrelles métalliques, est également importé par des architectes anglais. Ce type de construction protège des risques d’incendie.
Un site de mémoire
Victime de la récession économique, la filature ferme ses portes en 1981. Racheté par la Ville de Roubaix, le site Motte-Bossut entre dans les projets de restructuration du centre ville. Le bâtiment central et la grande nef, cédés à l’État en 1983, ont fait l’objet d’un programme de réhabilitation confié à l’architecte Alain Sarfati, dans le cadre des grands travaux de l’État en région (1989-1993). Ce vaisseau de briques, dont l’entrée se signale par un auvent suspendu, évocation du pont-levis, abrite depuis 1993 les Archives Nationales du Monde du Travail, qui conservent et sauvegardent les sources de l’histoire économique et sociale.