Un emplacement stratégique
Blottie dans la falaise Saint-Maurice, la citadelle d’Amiens se déploie discrètement dans un paysage de fond de vallée, tout près de la Somme et s’étend jusqu’au plateau nord sur près de 100 hectares à l’origine, 20 hectares actuellement. Elle occupe un emplacement stratégique depuis l’Antiquité, comme en témoignent le tracé de la Via Agrippa et les nombreux vestiges découverts lors des fouilles archéologiques, mais aussi au Moyen Âge, puisque subsiste encore la porte Montrescu, qui sert d’assise à l’actuel logis du gouverneur.
Afin de protéger la ville des invasions espagnoles au nord, François Ier fait construire un ravelin pour protéger son entrée qui s’effectue par la porte dite « François Ier », particulièrement décorée (1531) et encore visible aujourd’hui.
Un prototype méconnu
Construite en 1598, à la suite de l’invasion de la ville par les Espagnols un an plus tôt, la citadelle d’Amiens est une des premières applications en France du modèle italien dit « d’architecture rasante bastionnée ». De forme pentagonale, alternant bastions et courtines, entourée de fossés secs, elle complète un ensemble de fortifications qui ceinture la ville. Le gabarit proposé par Jean Errard de Bar-le-Duc, ingénieur du Roi Henri IV, s’appuie sur les portées de tirs de l’époque. Cette nouvelle architecture entend répondre aux progrès en matière d’armement, rendant inefficaces les constructions militaires passées.
Apparemment fait de briques et de pierres, l’ensemble semi-enterré est majoritairement édifié en terre, Jean Errard remblayant et déblayant le terrain naturel et réutilisant les vestiges de la porte Montrescu et de la porte François Ier. Les bâtiments intérieurs, comme les casernements, accueillent les troupes armées devenues professionnelles.
La citadelle contemporaine
En 1962, la démolition des deux bastions à l’est pour le passage d’un axe routier majeur vers le nord de la ville rompt son harmonie. En 1993, l’État cède le site à la ville d’Amiens qui l’entretient. En 2018, 4000 étudiants succèdent aux soldats au sein de la citadelle. Bien plus qu’une université, l’architecte italien Renzo Piano fidèle à ses convictions, propose une véritable place de ville au cœur de l’université. Il sublime ce paysage fortifié en offrant aux Amiénois une promenade d’un kilomètre depuis la partie haute des remparts, révélant une vue panoramique imprenable sur la ville.